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Les almanachs francophones dans l’aire culturelle allemande au XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle : contexte socio-culturel, évolution, structures

Hans Jürgen LÜSEBRINK

Université de Sarrebruck

LA CULTURE FRANCOPHONE DANS L’AIRE LINGUISTIQUE GERMANOPHONE – CONTOURS ET ENJEUX

L’aire linguistique et culturelle germanophone, embrassant des régions extrêmement diverses et qu’il serait anachronique de désigner par le terme d’« Allemagne », représentait en fait, au XVIIIe siècle, un espace foncièrement multiculturel marqué par la présence de plusieurs langues écrites ou orales : le latin en particulier jusque dans les années 1730, puis le français constituèrent des langues importantes de la communication savante par rapport auxquelles l’allemand n’arriva à s’imposer que très progressivement, à partir des années 1770, mais surtout 1820. Des langues minoritaires comme le danois, le sorbe, le tchèque, le slovaque et le polonais, dans les parties occidentales du royaume de Prusse et dans l’Empire autro-hongrois, étaient parlées par des centaines de milliers d’habitants du Saint-Empire romain germanique. L’aire culturelle germanophone fut en plus caractérisée par une activité de traduction intensive, surtout du français en allemand1, mais aussi par une présence du français et de la culture française parmi les élites sociales, présence encore insuffisamment étudiée.

Cette présence du français comme langue écrite et de communication dans l’aire germanophone, telle qu’elle est mise en lumière dans les travaux de Bettina Strauss, Louis Réau, Marc Fumaroli, Pierre-Yves Beaurepaire et Guido Braun2 et par les analyses plus ponctuelles d’Edgar Mass, de Jürgen Voss et d’Annett Volmer3, doit être replacée dans le contexte plus général de l’hégémonie culturelle de la France en Europe entre 1700 et 1815. Cette domination s’exerçait dans de nombreux domaines : outre la littérature, le journalisme, mais aussi les sciences, l’art, l’architecture, l’éducation des enfants, la mode, la danse, le théâtre et les arts scéniques ; de même, les manuels français concernant les formes de communication et les rituels sociaux étaient très en vogue outre-Rhin, en langue française ou en traduction et parfois en version bilingue, comme l’ouvrage Courtoisie française oder Die französische Höflichkeit 4 (1705). Ces manuels étaient présents dans les catalogues des foires du livre à Francfort dès les années 1713 à 17155. Enfin, surtout à l’époque révolutionnaire et napoléonienne, l’hégémonie culturelle française concerne aussi l’administration, le droit et l’organisation militaire.

Ce phénomène fut accompagné d’un transfert continu et massif de livres en langue française imprimés en France (ou par des éditeurs hors de France) vers l’aire culturelle germanophone6, et en même temps du développement d’une librairie et d’une presse en langue française rédigée, imprimée et diffusée sur place. Le rôle important de la langue française, au sein des élites intellectuelles et sociales, dans l’aire culturelle allemande au XVIIIe siècle se voit confirmé par le fait que des œuvres d’auteurs anglais comme David Hume, John Locke, Joseph Addison et Richard Steele furent proposées par exemple à la vente par les libraires de Düsseldorf à la fin du XVIIIe siècle par douzaines en langue française, de même que les ouvrages de Xénophon et Lucrèce ou ceux d’auteurs italiens7. Fritz Nies souligne que

les membres des cercles autour de l’éditeur Jacobi possédaient ou citaient les œuvres d’Aristote, Plutarque, Plaute ou Francisco Gómez Quevedo y Villegas en traduction française sans que cela n’étonne les contemporains8.

L’historien et philosophe Christian Wilhelm Dohm précise en 1777, dans l’introduction à son vaste recueil d’écrits relatifs à la statistique et à l’histoire des États modernes, qu’il allait traduire tous les textes et passages en langues étrangères, sauf ceux en latin et en français, langues apparemment maîtrisées sans problème par son lectorat savant9. Pour la lectrice assidue que fut la femme de lettres allemande Sophie von La Roche, écrivant et publiant elle-même aussi bien en allemand qu’en français10, la lecture de textes de la littérature française faisait partie intégrante de la vie quotidienne11, de même que la traduction personnelle d’extraits lui paraissant particulièrement intéressants. Fascinée par la lecture des lettres de Mirabeau, elle en choisit et traduisit de larges extraits afin de mieux s’approprier sa pensée politique et son style émotionnel et emphatique12. Franz Horn, l’éditeur de la correspondance, menée dans les années 1754 à 1805, entre Sophie von La Roche et l’écrivain Christian Martin Wieland, un des représentants majeurs du « classicisme de Weimar », qui parlait lui-même l’allemand et le français, pouvait encore affirmer en 1820, qu’il n’était à son avis pas nécessaire de traduire les lettres en français pour le public visé en Allemagne. Il note dans l’introduction de l’ouvrage :

Une traduction de ces lettres me sembla superflue et inutile. C’est superflu parce que cette langue [le français] est si généralement connue qu’on ne trouvera parmi cent lecteurs de ce recueil que guère quatre ou cinq qui auraient des difficultés à la lecture de ces lettres faciles13.

Mais il jugea aussi une traduction comme « inutile » (unzweckmäßig) « puisque le fait d’écrire des lettres en français faisait partie de la couleur de ce temps », c’est-à-dire des dernières décennies du XVIIIe siècle. Horn ajoute que ce fait d’« écrire » en français représentait alors une « erreur à la mode », mais était désormais dépassé « depuis fort longtemps »14.

L’influence importante de la culture française même en dehors du milieu des cours princières est révélée entre autres par le fait que, dans une ville fortement orientée vers le commerce comme Francfort-sur-le-Main, non seulement six des vingt-deux périodiques parus au XVIIIe siècle étaient publiés en français, mais aussi qu’une part importante des annonces dans la presse et des titres proposés dans les cabinets de lecture, comme celui du libraire Seyberth ouvert en 177515, concernaient des livres français16. De nombreux textes de la littérature arabe et orientale ne furent par exemple traduits en allemand qu’à partir du français. Les périodiques français dans toute leur variété ont constitué, dans ce contexte, le média le plus important de ce transfert non seulement d’informations et de savoirs, mais aussi de modèles culturels, de modes esthétiques, et de pratiques culturelles.

Les centres de publication des périodiques en langue française étaient situés à Berlin (19), Vienne (12) et Francfort-sur-le-Main (6). Mais de nombreuses autres villes germanophones jouèrent aussi un rôle non négligeable ; des villes princières et résidentielles pour la noblesse comme Mannheim, Gotha, Neuwied ou Cologne s’imposèrent en tant que centres d’édition en langue française17. D’après l’étude de Mass, qui ne porte toutefois que sur les gazettes et journaux francophones et non pas sur d’autres corpus, comme les almanachs, approximativement 10 % de la presse francophone du XVIIIe siècle fut imprimée et publiée dans l’Europe germanophone18. Les correspondances en langue française, telle la Correspondance littéraire secrète de Louis-François Mettra publiée à Neuwied19, ainsi qu’un certain nombre de gazettes et de journaux publiés en Allemagne en langue française telle la Gazette des Deux-Ponts20, la Gazette de Cologne (publiée entre 1734 et 1794), la Gazette universelle de littérature, le Courrier du Bas-Rhin21 ou le Nouveau Mercure de France22 ont déjà été analysés à travers des études de cas approfondies. Par contre, en ce qui concerne les almanachs et calendriers de poche en langue française, faisant actuellement l’objet d’un projet de recherche commun entrepris avec Y.-G. Mix, il n’existe encore aucune bibliographie ou étude de contenu, ni aucune analyse de leur contexte de production et de réception.

Les recherches sur les périodiques francophones en Allemagne au XVIIIe siècle, qui n’ont que très marginalement pris en considération le corpus des almanachs, estiment qu’environ une centaine de périodiques francophones fut publiée dans l’aire germanophone au XVIIIe siècle23. Ce chiffre a, selon Mass, « augmenté presque continuellement entre 1731 et 1790 de décennie en décennie, à l’exception des années 1761 à 1790 »24. Les recherches bibliographiques entamées sur le corpus des almanachs montrent qu’une prise en considération systématique des almanachs entraîne presque un doublement de ce chiffre de 100 publications de périodiques avancé précédemment. Environ 90 séries différentes d’almanachs francophones ont, en effet, pu être relevées dans les bibliothèques d’Allemagne, de Suisse, d’Autriche et de Pologne, pour le XVIIIe siècle, auxquelles s’ajoutent presque une vingtaine de séries parues pendant la période de l’Empire.

Une première bibliographie établie montre que la production d’almanachs en langue française dans l’aire culturelle germanophone ne commença guère, de manière significative, avant les années 1730 (cf. graphique), et qu’elle s’effectua de manière continue pendant toute la période étudiée (1700-1815), avec quelques pics de publication dans les années 1770, au début de la Révolution française et pendant l’Empire napoléonien, en particulier les années 1806-1810. On ne constate donc pas une diminution de l’importance de la production de périodiques francophones et de l’influence culturelle française depuis les années 1760, comme cela avait été avancé par certains chercheurs25, mais au contraire une forte poussée conjoncturelle à partir notamment des années 1770, qui virent en même temps la montée en puissance d’une réflexion sur la langue allemande valorisant son emploi comme langue littéraire, académique et scientifique. Le dépouillement des catalogues de la foire de Leipzig met en lumière que la présence de livres et périodiques en langue française, produits en France ou à l’étranger, sur le marché allemand n’a pas reculé, mais qu’il a continuellement augmenté au cours du XVIIIe siècle, ce qui tend à prouver que la culture francophone a rencontré un intérêt dans la société germanophone bien au delà des cercles de la cour. Ainsi le commerce des livres en langue française, qui représentait seulement 1 % du commerce total de la foire de Leipzig en 1700, représenta-il plus de 13 % du chiffre d’affaires de cette même foire en 177026.

Les almanachs francophones parus en langue française dans l’aire linguistique et culturelle allemande sont d’une très grande variété et concernent une grande partie de l’éventail du genre éditorial de l’almanach, mis à part les almanachs populaires (ou de grande diffusion, comme les almanachs de type Messager Boiteux/Hinkende Bote ou Mathieu Lœnsbergh) diffusés essentiellement par la voie du colportage27. Ces almanachs francophones visaient quasi exclusivement un public appartenant aux élites sociales, allant de la haute noblesse clientèle de l’Almanach de la Cour jusqu’à la bourgeoisie marchande et aux dirigeants des administrations princières puis, révolutionnaires et impériales. Au sein de ce corpus, on peut distinguer essentiellement six types différents d’almanachs qui sont investis chacun de formes et de fonctions spécifiques, et auxquels s’ajoutent également des « formes mixtes » : 1) Les almanachs de la cour ; 2) Les almanachs généalogiques ; 3) Les almanachs administratifs ; 4) Les almanachs littéraires ; 5) Les almanachs de théâtre ; 6) Les almanachs territoriaux.

Les almanachs en langue française dans l’aire culturelle et linguistique germanophone, 1700-1815 : profil et évolution d’un corpus.

Le premier type d’almanachs, les almanachs de la Cour, est centré autour du foyer même de la culture française dans l’aire culturelle germanophone au XVIIIe siècle, les cours princières, qui avaient introduit, dès la fin du XVIIe siècle, des pratiques comme le ballet et le théâtre français, et qui avaient fait venir de nombreux maîtres de danse, comédiens, musiciens, secrétaires et maîtres de langues afin d’appuyer l’ancrage de la langue et de la culture française. Reprenant le modèle de l’Almanach royal de France28, en le transférant et en l’adaptant à l’aire culturelle germanophone, les almanachs de la cour parus en langue allemande ou française à partir de 1704 en Prusse, de 1728 en Saxe et de 1736 en Autriche, contenaient en général, outre un calendrier, des tableaux très différenciés des charges et des fonctions d’une cour royale ou princière et de leurs détenteurs actuels29. Les almanachs de la cour en langue française apparurent dès le début du XVIIIe siècle outre-Rhin, dans des séries comme l’Almanach de la Cour Électorale de Cologne (1719-1794), l’Almanach de la Cour Impériale et Royale de Vienne (1766-1805, 1807-1811), l’Almanach Électoral Palatin (1750-1778), une version française du Kurpfälzischer Hofund Staatskalender paru chez le même éditeur, Nicolas Pierron, d’origine lorraine, à Mannheim à partir de 1748, l’Almanach royal de Prusse publié en 1769, ainsi que l’Almanach royal de Westphalie (1810-1813), calqué sur la conception et la structure formelle de l’Almanach impérial napoléonien qui réunit le genre de l’almanach de la cour et celui de l’almanach administratif 30.

Le second type d’almanachs francophones, les almanachs généalogiques, était pourvu d’un calendrier, élément pour ainsi dire incontournable d’un almanach, et avait comme contenu la généalogie des familles princières d’une aire culturelle spécifique, voire, comme ce fut le cas de l’Almanach de Gotha à partir de 1764, de l’Europe entière. Outre le fameux Gotha, d’autres séries parurent dans l’aire culturelle germanophone, comme l’Almanach généalogique de Brunswick-Luneburg, contenant des connaissances utiles et agréables (1771-1774), l’Almanach généalogique et militaire (Berlin, 1769-1789) publié par l’Académie de Berlin (qui avait obtenu le privilège royal pour la publication d’almanachs et de calendriers en Prusse, constituant sa principale source de revenus) ainsi que l’Almanach de poche, avec la connaissance des rois, reines, etc. de l’Europe (1764). Le fait que l’Almanach généalogique et militaire de Berlin fut imprimé en 1770 à un tirage de 15 000 exemplaires dont 4 200 pour la version française31, montre que la diffusion de ce type d’almanach dépassait largement les milieux des cours princières. Représentant le tableau des détenteurs du pouvoir dans l’Europe monarchique, ces almanachs constituaient à la fois des formes extérieures de légitimation du pouvoir et des vadémécum généalogiques à l’intérieur et à l’extérieur de la société de cour. La censure exercée à l’époque napoléonienne outre-Rhin contre des almanachs généalogiques persistant à représenter les princes déchus et leurs « dynasties vicieuses » souligne d’emblée leur dimension politique. Selon Bongars, chef de la police du royaume de Westphalie, des almanachs comme l’Almanach de Brunswick donnaient en effet, à cause des généalogies des maisons déchues qu’ils continuaient à publier, « lieu à des observations et des espérances folles » ainsi qu’à « de fausses interprétations » susceptibles d’« échauffer les esprits »32.

Les almanachs administratifs, donnant des informations administratives de base pour les habitants d’un territoire donné – d’une principauté sous l’Ancien Régime, d’un département également à l’époque révolutionnaire et impériale, pendant l’annexion française – forment un corpus représenté outre-Rhin par plus d’une quinzaine de séries, comme : l’Almanach saxon. État civil et militaire de la Saxe (1764) ; l’Almanach de Vienne, à l’usage des étrangers (1773) ; l’Almanach de poche, (. . .) à l’usage du duché du Luxembourg (1768) ; ainsi qu’à l’époque révolutionnaire et impériale l’Almanach portatif, à l’usage des habitans des villes du départements des Forêts (Luxembourg, 1809-1813) ; l’Annuaire statistique du département de Rhin et Moselle (1808-) ; l’Almanach du département de la Roer (1809-1813) ; l’Almanach de l’arrondissement de Clèves (1812) ; ou encore l’Annuaire topographique et politique du département de la Sarre (1810). Ces almanachs sont caractérisés par un usage prioritairement pragmatique, lié au transfert de pratiques administratives et juridiques provenant de France et nécessitant l’apprentissage, par le lectorat outre-Rhin, d’un vocabulaire administratif et juridique spécialisé en langue française.

Les almanachs littéraires, de contenus assez variés, étaient centrés, d’une part, autour de la publication de textes littéraires brefs (anecdotes, poésies, sentences, aphorismes, chansons, parfois de brèves pièces de théâtre) ; et, d’autre part. autour de la critique littéraire qui s’est développée notamment dans l’Almanach des dames publié en co-édition par l’éditeur Cotta à Tübingen, un des grands éditeurs du sud de l’Allemagne, et différents éditeurs parisiens, notamment Treuttel, entre 1801 et 1840. S’adressant en partie à un public féminin, les almanachs littéraires comme l’éphémère Almanach des muses (1775-1777) de l’éditeur Dieterich à Göttingen33 ou l’Almanach des dames, prolongeaient la tradition de l’Almanach des muses (1765-1833) créée en 1764 par Sautreau de Marsy34. L’Almanach des dames valorisa tout particulièrement la prise de parole d’auteurs féminins, depuis la vive polémique autour de l’écriture féminine qui s’est déroulée dans ses colonnes en 1802/180335. Des séries parfois de courte durée comme l’Almanach de poche contenant des contes romanesques dédié au beau sexe (Vienne, 1718), les Étrennes pour les enfants, traduites en partie de la Bibliothèque des Enfants de Mr. Campe (Hambourg, 1782), les Étrennes littéraires publiées à Vienne en 1809 ainsi que les Étrennes des grâces pour les dames, publiées à Vienne chez Löschenkohl en 1799, témoignent de la vitalité de ce type d’almanachs lié à plusieurs fonctions : diffusion de la littérature et de culture françaises dans l’aire culturelle germanophone ; prise de parole et diffusion de nouveaux auteurs, pour lesquels le français représentait parfois une langue secondaire, choisie pour l’expression littéraire ; et alimentation aussi de la conversation mondaine, menée en français, dans les cours princières allemandes jusqu’à la fin de l’époque napoléonienne et dans les milieux aristocratiques et grands-bourgeois allemands bien au-delà de l’année-rupture 1815.

Forme spécifique des almanachs littéraires, mais s’en différenciant en même temps, les almanachs de théâtre36 avaient pour but et pour fonction de suivre et de diffuser l’actualité théâtrale en France parmi un public francophone et francophile allemand. Les almanachs de théâtre en langue française s’orientèrent néanmoins de plus en plus d’abord vers le théâtre français en Allemagne, puis aussi vers le théâtre allemand qu’ils souhaitaient faire connaître d’un public francophone, ainsi que vers l’élaboration d’un discours critique remplaçant ou supplantant une approche purement médiatrice du théâtre. Ce genre d’almanachs est notamment représenté à travers plusieurs séries émergeant à Vienne au milieu du XVIIIe siècle, calquées sur des modèles français, puis à travers des almanachs de théâtre publiés à Hambourg et à Berlin à l’époque révolutionnaire et impériale.

Les Theateralmanache en Allemagne, qui connurent un essor et une diffusion considérable au XIXe siècle, étaient issus d’un transfert culturel d’un genre initialement créé en France, avec l’Agenda historique et chronologique des théâtres de Paris de François Parfait paru en 1734 à Paris et l’Almanach historique et chronologique de tous les spectacles de l’abbé Laporte ainsi que sa continuation, le Calendrier historique des théâtres de l’opéra qui parurent également à Paris en 1751 et en 1752. Ces premiers almanachs de théâtre furent suivis par les Spectacles de Paris ou Calendrier historique ou chronologique des théâtres (1751-1801), qui servit de modèle au Theater-Kalender publié par Heinrich August Ottokar Reichard à Gotha entre 1775 et 1794 et de 1796 à 1800. Ce dernier titre, lancé à l’occasion de l’inauguration du Hoftheater de Gotha en 1775, adapta son modèle au goût esthétique du public allemand, c’est-à-dire en recentrant son intérêt sur des textes dramatiques très appréciés par les spectateurs allemands et en développant les critiques des pièces de théâtre et les essais sur l’histoire du théâtre.

Selon Paul Ulrich et Annegret Oesterlein, vingt-quatre almanachs de théâtre en allemand furent publiés entre 1755 et 1800 dans l’aire culturelle allemande37 : quatorze à Vienne, les autres à Berlin, Francfort, Gotha, Hamburg, Leipzig, Mayence, Mannheim, Offenbach, Prague et Presbourg. À ces titres en allemand s’ajoutent les almanachs de théâtre en langue française parus en langue française dans l’aire germanophone pendant cette période, soit au moins cinq titres : trois parus à Vienne, l’Almanach du théâtre (1755), l’Almanach à l’usage des théâtres (1758-1759) et le Répertoire des théâtres de la ville de Vienne (1752-1757) ; les Étrennes de Thalie ou Almanach du théâtre français (1799) ; et l’Almanach du Théâtre paru à Berlin en 1809 portant, sur sa page de titre, l’indication « par Aug. Guill. Iffland. Directeur du Théâtre royal national traduit de l’allemand ».

Les almanachs de théâtre proprement dits occupent ainsi quantitativement une place plutôt marginale au sein des almanachs en langue française publiés dans l’aire culturelle germanophone entre 1700 et 1815, mais l’information théâtrale forma un élément constitutif de certains almanachs littéraires et almanachs de cour. Cette information était liée à la forte présence de pièces de théâtre en français jusque dans les années 177038, la langue française étant devenue, comme le souligne l’Almanach du Théâtre pour 1809, « l’idiome de tous ceux qui prétendaient avoir reçu quelque éducation »39. L’Almanach du Théâtre d’Iffland, publié par son auteur parallèlement à son Almanach für Theater und Theaterfreunde édité à Berlin entre 1807 et 1812 (sauf 1810), parut à Berlin en 1808 et en 1809. Il était lié à une seconde période de haute conjoncture de la langue et de la culture française en Allemagne, l’empire napoléonien, dont l’expansion militaire et politique entraîna une forte expansion de la communication en français et des médias y afférant, comme notamment les périodiques, les imprimés administratifs et les textes juridiques, mais aussi la production littéraire40.

De nombreux almanachs – plus d’un tiers du corpus – sont, enfin, représentés à travers des séries d’almanachs à thématique spécifiques, souvent de courte durée et liés à des phénomènes de mode et de conjoncture, comme l’Almanach de la toilette et de la mode (1770) ; l’Almanach intéressant de la Loterie électorale Palatine paru à Mannheim en 1773 ; l’Almanach des adresses de la ville de Coblence (1803) ; l’Almanach des bizarreries humaines, ou Recueil d’anecdotes sur la Révolution (1796) ; ainsi que le Allgemeiner Katholisch-protestantischer Kalender/Calendrier universel des Catholiques et des Protestants, seul almanach bilingue du corpus, édité à Weimar en 1809 et s’adressant à la fois aux catholiques et aux protestants.

TRANSFERTS CULTURELS ET APPROCHES COMPARATIVES

Le corpus des almanachs francophones dans l’aire germanophone au XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle témoigne de l’importance et de l’impact socioculturel de l’imprimerie française hors de France dans le domaine aussi des périodiques. Le dernier élément de cette production riche et diversifiée, qui connut son apogée d’abord dans les années 1760-1770 puis à l’époque impériale avant de reculer brutalement après 1815, fut l’Almanach des dames co-édité par Treuttel et Würtz à Paris et à Strasbourg et par la fameuse maison Cotta à Tübingen, et qui parut pour la dernière fois en 1840. Loin de représenter de pures transpositions ou imitations de modèles d’almanachs hexagonaux, les almanachs francophones parus outre-Rhin entre 1700 et 1815-1840 sont caractérisés par une adaptation interculturelle aussi bien des formes que des contenus et des styles de langage.

L’adaptation des contenus aux besoins d’information du public ciblé est à la base de toutes les formes de transferts transculturels de modèles d’almanachs, comme on peut les observer notamment aussi entre l’Europe et les Amériques41. La partie calendaire, mais aussi dans une large mesure la partie « Éphémérides » et celles relatives aux informations sur les administrations, furent remplies de contenus « locaux », de même que, dans une moindre mesure, la partie « Variétés » des almanachs comportant souvent de brefs textes littéraires et de nombreux conseils pragmatiques. Certains éditeurs d’almanachs s’expliquent, dans leurs préfaces, sur ces formes d’adaptation interculturelles, comme le traducteur du Theateralmanach de Iffland publié en 1809 à Berlin, chez Braunes : il souligne qu’il a choisi d’omettre dans la version française de l’almanach des textes « d’un intérêt tout-à-fait local », de les remplacer par des « anecdotes dramatiques » et d’adapter les informations fournies sur le théâtre allemand auxquelles « il a fallu donner une forme un peu différente »42. Il a aussi décidé d’insérer dans la version française de l’almanach des textes spécifiquement destinés à un public francophone.

L’Almanach des muses de l’éditeur Dieterich à Göttingen publié entre 1775 et 1777 fut d’abord une pure imitation de son illustre original français, republiant des extraits de son modèle parisien. Ne pouvant pas s’appuyer sur la même culture de la sociabilité des salons que l’Almanach des muses parisien, et ayant décidé, en 1777, de proposer aussi des contenus de première main, en particulier des textes en prose, l’échec de cet almanach s’explique par le fait que son éditeur se montra incapable de trouver une formule originale bien adaptée au public ciblé en Allemagne43. Cet ancrage dans une sociabilité cultivée, ce Sitz im Leben qui était à la base du succès du modèle parisien, lui faisait défaut, et les poésies françaises reprises dans l’Almanach des muses n’étaient plus ainsi que de simples « documents » d’une culture française fortement idéalisée44.

Les almanachs en langue française parus dans l’aire culturelle germanophone se distinguent, en second lieu, par l’imbrication entre la traduction proprement dite, et le transfert culturel qu’ils réalisent en même temps par l’intégration de nouvelles données spécifiques destinées à un public de lecteurs différent. On trouve en effet dans ce corpus de nombreux textes traduits – ou imités – de l’allemand pour un public dont la langue maternelle était l’allemand, mais dont la langue de lecture et de communication culturelle fut, jusqu’en 1815, en premier lieu le français. Les nombreuses traductions-imitations de l’écrivain suisseallemand Salomon Gessner parues dans l’Almanach des dames en constituent des exemples.

Il en va de même pour le « Coup d’œil sur l’origine, les progrès et l’état actuel du théâtre allemand »45 paru en 1809 dans l’Almanach du Théâtre de August Wilhelm Iffland à Berlin – et qui était la traduction d’un texte paru auparavant dans la version allemande de l’almanach. Ce long texte se proposait de présenter le nouveau théâtre allemand, son esthétique et ses pièces majeures, à un public francophone et orienté quasi exclusivement vers la production théâtrale française, auquel Iffland jugea très « utile » (zweckmäßig) de faire connaître le spectaculaire renouveau de l’art dramatique allemand dont il fut lui-même, en tant que directeur du Théâtre National (Nationaltheater) de Berlin entre 1796 et 1814, un des protagonistes institutionnels les plus importants. Il complète, à travers une esquisse historique condensée et incisive, le « Tableau des principaux théâtres de l’Allemagne et analyse des meilleures publications dramatiques qu’on y a données depuis le 1er septembre 1807 jusqu’au 1er septembre 1808 »46 paru dans le même almanach. Publié pour un public francophone en Allemagne, l’Almanach du Théâtre met en lumière les relations très étroites entre traduction et médiation interculturelle dans ce corpus d’almanachs : tout en transmettant à un public francophone les nouvelles de la scène théâtrale parisienne47, puisées et extraites de périodiques français (« d’après les meilleurs journaux français »48), il fait découvrir ou mieux apprécier le nouveau théâtre allemand à ce même public.

Les phénomènes de traduction et de transferts interculturels apparaissent de manière caractéristique pour ce corpus des almanachs francophones au sein des séries bilingues, comme l’Almanach de poche de Göttingen, publié parallèlement par le même éditeur (Dieterich) en langues allemande et française, l’Almanach de la cour palatine, version française du Mannheimer Hofkalender, ou encore l’Almanac de la cour de S.A.S.E. de Cologne paru en deux séries parallèles, en langues française et allemande49. Destinées en partie à des publics différents, ces séries en deux langues publiées parallèlement par les mêmes éditeurs témoignent d’une part, en ce qui concerne les almanachs liés à la sphère de la cour, de la volonté d’une auto-représentation et d’une légitimation du pouvoir en langue française aussi bien à l’égard des élites allemandes qu’envers le public international, en particulier les diplomates. S’y ajoute la nécessité de l’apprentissage du français, « langue du pouvoir », et des nomenclatures de charges administratives, de fonctions et de titres, de styles de communication et de rituels de la cour, un besoin auquel se devaient de répondre les almanachs en langue française.

L’existence de séries parallèles en deux langues où le lecteur pouvait trouver facilement l’équivalent de titres comme « Baron de » (Freyherr von) ou « Le Sérénissime Prince » (Seine Hochfürstliche Duchleucht Herr) en confrontant les deux exemplaires allemand et français, par exemple de l’Almanach de la cour de Mannheim, facilitait l’acquisition d’un français spécialisé directement utilisable dans la vie quotidienne des lecteurs. Ces derniers pouvaient aussi apprendre, à travers une consultation en parallèle des deux almanachs, que de nombreuses formes d’adresse et de politesse allemandes, comme « Der Hochgebohrne Graf », « Der Hochwürdige Herr » ou, du côté féminin, « Ihre Exzellenz Frau » et « Ihre Hochfürstliche Gnaden » avaient comme équivalent français, dans les rituels communicatifs de la cour de Mannheim qui compta dans les années 1760-1770 un millier de personnes, tout simplement les termes de « Monsieur » ainsi que de « Madame » et « S. A. Madame »50. Face aux séries publiées parallèlement en deux langues, et traduites partiellement ou entièrement, l’existence d’un almanach intégralement bilingue comme le très éphémère Allgemeiner katholisch-protestantischer Kalender : Nachweisung für die Jahre der christlichen Zeitrechnung von 1 bis 2200 = Calendrier universel des catholiques et des protestants publié pour 1809 à Weimar51, fait plutôt figure d’exception.

L’impressionnant succès de l’Almanac de Goettingue (1776-1813), version française du Göttinger Taschen Calender parue parallèlement à son équivalent allemand, amène à s’interroger sur la fonction du français et sur sa persistance comme langue de culture en dehors des cours princières, bien au-delà même de ces années 1770 souvent considérées comme une époque de rupture. Traduction relativement fidèle et effectuée de manière brillante par le savant d’origine huguenotte Isaac Colom du Clos (1708-1795), professeur de rhétorique à l’université de Göttingen, cet almanach atteignit le tirage très élevé pour l’époque de 8 000 exemplaires. Sa version française, rédigée par le philosophe Georg Christoph Lichtenberg et illustrée par Daniel Chodowiecki, très renommé dans l’aire germanophone à l’époque, ne se caractérise, paradoxalement, ni par l’adaptation de ses contenus à un public francophone ni par une orientation particulière vers la culture française, dont certains excès et certaines modes y font au contraire l’objet de critiques très ironiques. Plus orienté vers l’Angleterre, notamment avec la place qu’il offre à la réception de William Hogarth, et publiant des textes de haut niveau sur l’astronomie, la physique, l’anthropologie, la philosophie et l’ethnologie, forum aussi de discussion pour la controverse entre Lichtenberg et Lavater au sujet de la physiognomie, cet almanach-bestseller publié en langue française à Göttingen dut son succès de longue durée sans doute à sa visée et son orientation délibérément européennes qui firent pour une large part son originalité. Il diffusa, à une époque où la langue française constituait la lingua franca de la république européenne des lettres, l’esthétique, mais aussi les contenus du Göttinger Taschen Calender, sans doute l’un des périodiques les plus novateurs et les plus originaux de l’Auflkärung allemande, bien au-delà des frontières linguistiques du Saint-Empire romain germanique, « en France, en Hollande, en Angleterre et en Russie », comme le formule Lichtenberg lui-même dans une lettre du 22 décembre 178452.

MISES EN PERSPECTIVE

Considérer les littératures et cultures francophones hors de France au siècle des Lumières à travers le média des almanachs francophones permet de décloisonner la perspective nationale propre aux disciplines philologiques héritées du XIXe siècle. Une part importante de la littérature en langue française de l’époque, et notamment de la presse, a été en effet rédigée produite et diffusée non pas dans l’hexagone, mais dans de nombreux autres pays européens, dans les principautés allemandes et italiennes, en Suisse, en Hollande, mais aussi en Russie, en Pologne, au Danemark et en Suède. Prendre en considération la littérature et la presse francophones hors de France au siècle des Lumières implique un élargissement du corpus de la littérature canonisée (Literaturkanon, Höhenkammliteratur) vers des textes littéraires non canonisés ainsi que vers la presse, les almanachs ou les discours académiques, et nécessite le développement d’orientations méthodologiques spécifiques. Les trois orientations suivantes constituent autant de champs de recherche :

1) Le premier champ est celui de l’analyse de l’infrastructure éditoriale et culturelle de la francophonie européenne hors de France au siècle des Lumières. Cette francophonie concerne des éditeurs comme Cotta à Tübingen et Löschenkohl à Vienne, dont on connaît assez peu la production francophone reflétée à travers leur édition d’almanachs en langue française, mais aussi des journalistes et des écrivains francophones écrivant en français hors de France, tel Frédéric II de Prusse ou encore Louis François Mettra, éditeur de la Correspondance littéraire secrète à Neuwied. Ce sont néanmoins les traducteurs qui furent les véritables intermédiaires culturels entre la francophonie européennes et les cultures non francophones au XVIIIe siècle, comme en témoigne leur travail effectué pendant des décennies à travers le média des almanachs et ses versions bilingues à Göttingen, Cologne, Mannheim et Weimar.

2) Une deuxième orientation méthodologique concerne les transferts culturels : les littératures et cultures francophones hors de France au siècle des Lumières, tout en utilisant la langue française et en reprenant les modèles génériques de la métropole, proposent des formes originales d’adaptation culturelle et de réception productive. Le corpus des almanachs étudiés ici offre une excellente illustration de ces formes d’appropriation culturelle créative.

3) Les productions littéraires et journalistiques francophones éditées hors de France au siècle des Lumières s’insèrent, en troisième lieu, dans une configuration bilingue et biculturelle complexe dépassant le simple niveau textuel pour rejoindre celui de la fonction socio-politique de la presse et de la littérature francophones hors de France au XVIIIe siècle, une littérature au capital culturel élevé, mais en situation sociale très minoritaire.

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1 Cf. Hans-Jürgen Lüsebrink et Rolf Reichardt, avec Annette Keilhauer et René Nohr (dir.), Kulturtransfer im Epochenumbruch. Frankreich/Deutschland 1770-1815, Leipzig, Leipziger Univer-sitätsverlag, 1996, 2 vol.

2 Voir successivement Bettina Strauss, La Culture française à Francfort au XVIII e siècle. Paris, F. Rieder, 1914 ; Louis Réau, L’Europe française au siècle des Lumières, Paris, Albin Michel, 1938, nouv. éd. 1971 ; Marc Fumaroli, Quand l’Europe parlait français, Paris, De Fallois , 2001 ; Marc Fumaroli, « Als Europa französisch sprach », trad. Ulrich Kunzmann, Sinn und Form, 2003, LV, pp. 149-162 ; Guido Braun, Von der politischen zur kulturellen Hegemonie Frankreichs, 1648-1789, Darmstadt, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 2008, pp. 146-202. Cf. aussi Dieter Kimpel (dir.), Mehrsprachigkeit in der deutschen Aufklärung, Hamburg, Meiner, 1985 ; Pierre-Yves Beaurepaire, Le Mythe de l’Europe française au XVIII e siècle. Diplomatie, culture et sociabilités au temps des Lumières, Paris, Éditions Autrement, 2007.

3 Edgar Mass, « Die französische Presse im Deutschland des 18. Jahrhunderts. Köln, ein unreprä-sentatives Beispiel », dans Mehrsprachigkeit in der deutschen Aufklärung, ouvr. cité, pp. 156-177 ; Jürgen Voss, « Un centre de diffusion de livres français dans l’Allemagne du XVIIIe siècle : la librairie Fontaine à Mannheim », dans Michel Espagne et Michael Werner (dir.), Transferts. Les relations interculturelles dans l’espace franco-allemand (XVIII e et XIX e siècles), Paris, Éd. du C.N.R.S., 1988, pp. 261-272 ; Annett Volmer, Presse und Frankophonie im 18. Jahrhundert : Studien zur französischsprachigen Presse in Thüringen, Kursachsen und Russland, Leipzig, Leipziger Universitätsverlag, 2000.

4 La Courtoisie françoise oder Die französische Höflichkeit [texte en français et en allemand], nouv. éd., Frankfurt, Sand, 1705.

5 Strauss, Culture française à Francfort, ouvr. cité, p. 76.

6 Frédéric Barbier, « La librairie française et l’Allemagne rhénane au XVIIIe siècle », dans Heinke Wunderlich et Jean Mondot (dir.), Deutsch-französische Begegnungen am Rhein 1700-1789/ Rencontres franco-allemandes dans l’espace rhénan entre 1700 et 1789, Heidelberg, Winter, 1994. pp. 177-198.

7 Fritz Nies, « Pudelnärrische poßierliche Mährchen und die besten Früchte des Genies », dans Herbert Anton et Gerhard Kunz, Düsseldorf in der deutschen Geistesgeschichte (1750-1850), Düsseldorf, Schwann, 1984, pp. 55-56.

8 Nies, « Pudelnärrische poßierliche Mährchen », art. cité, p. 55.

9 Christian Wilhelm Dohm, Materialien für die Statistik und neuere Staatengeschichte, Lemgo, Meyersche Buchandlung, 1777, vol. I, « Vorrede » [pp. 1-10, ici p. 5].

10 Par exemple Sophie de La Roche, Les Caprices de l’amour et de l’amitié. Anecdote anglaise ; suivie d’une Petite anecdote allemande, Zurich, Orell, Gessner, Fuessli & comp., 1772. La traductrice française de son roman Geschichte des Fräuleins von Sternheim (1771) paru en langue française chez Gosse à La Haye en 1775, à qui elle avait envoyé pour publication des anecdotes directement écrites en français remarqua toutefois : « (…) Madame de La Roche m’a envoyé deux Anecdotes, écrites en Français, mais imprimées avec beaucoup de fautes ; j’ai rempli son intention en faisant au morceau que j’ai choisi les changements de style qui m’ont paru nécessaires » (« Avertissement », dans Mémoires de Mademoiselle de Sternheim, publiées par M r. Wieland, et traduits de l’Allemand par Madame***, La Haye, Gosse, 1775, 2 vol., t. II, pp. 3-4, ici p. 3).

11 Cf. Barbara Becker-Cantarino, Die Schriftstellerin Sophie von La Roche und Mein Schreibetisch (1799). Vorwort, dans Sophie von La Roche. Mein Schreibetisch, Karben, 1997, vol. 1, p. 8.

12 Sophie von La Roche, Reisetagebücher. Auszeichungen zur Schweiz, zu Frankreich, Holland, England und Deutschland. Ausgewählt und mit Einführung versehen von Klaus Pott und Charlotte Nerl-Steckelberg. Konstanz, Ed. Isele, 2006, pp. 307-310.

13 C. M. Wielands Briefe an Sophie von la Roche, nebst einem Schreiben von Gellert und Lavater, Franz Horn (éd.), Berlin, Christiani, 1820, avertissement au lecteur (« Dem Leser), pp. III-VIII, ici p. IV : « Eine Übersetzung der in französischer Sprache geschriebenen Briefe in das Deutsche schien mir überflüssig und unzweckmäßig. Ueberflüssig, denn jene Sprache ist nun einmal so allgemein bekannt, daß unter hundert Lesern dieser Sammlung sich wohl kaum vier oder fünf finden dürften, für welche die Lektüre dieser leichten Briefe Schwierigkeiten haben dürfte; aber auch sehr unzweckmäßig, würde eine solche Uebersetzung seyn, denn es gehörte in der Tat zur Farbe jener Zeit, französische Briefe zu schreiben ».

14 Ibid., p. V : « Dieser Mode-Irrthum, der auch den grand Voltaire und einiges andere Uebertreibende nach sich zieht, kann indessen, glaube ich, niemanden mehr verführen, da derselbe längst vorüberge-gangen ist… ”

15 Strauss, Culture française, ouvr. cité, p. 115.

16 Ibid., p. 116.

17 Ibid.

18 Braun, Von der politischen zur kulturellen Hegemonie, ouvr. cité, p. 199 ; Mass, « Französische Presse », art. cité.

19 Angelike Karin, Louis-François Mettra. Ein französischer Zeitungsverleger in Köln (1770-1800), Köln, Wien, Böhlau, 2002.

20 Silvia Eichhorn-Jung, Aufklärung und Universalitätsanspruch in der Zweibrücker Gazette universelle de littérature (1770-1780), Frankfurt, Peter Lang, 2000.

21 Matthias Beermann, Zeitung zwischen Profit und Politik. Der Courrier du Bas-Rhin (1767-1810). Eine Fallstudie zur politischen Tagespublizistik im Europa des späten 18. Jahrhunderts, Leipzig, Leipziger Universitätsverlag, 2001.

22 Annett Volmer, « lheater-Kalender und Revolutionsalmanach als Experimentier-labor einer nationalen Einheitsidee », dans Euphorion, n° 96, 2002, pp. 449-467.

23 Edgar Mass, Die Französische Presse im Deutschland des 18. Jahrhunderts. Köln, ein unrepräsentatives Beispiel, dans Dieter Kimpel, Mehrsprachigkeit in der deutschen Aufklärung, Hamburg, Meiner, 1985, pp. 156-177 ; François Moureau, « La presse allemande de langue française (1686-1790). Étude statistique et thématique », dans Gerhard Sauder et Jochen Schlobach (dir.), Aufklärungen. Frankreich und Deutschland im 18. Jahrhundert, Heidelberg, Winter, 1986, vol. I, pp. 243-252 (statistiques pp. 244 et 246) ; le chiffre d’environ cent périodiques est aussi cité par Braun, Von der politischen zur kulturellen Hegemonie, ouvr. cité, pp. 177 et 199 ; Volmer, « lheater-Kalender », art. cité.

24 Mass, Die Französische Presse im Deutschland des 18. Jahrhunderts, ouvr. cité, p. 158 (traduction H.-J. L.)

25 Voir par exemple Beaurepaire, Mythe de l’Europe française, ouvr. cité, p. 219.

26 Volmer, Presse und Frankophonie, ouvr. cité, p. 5.

27 Cf., sur ce corpus, Hans-Jürgen Lüsebrink et al. (dir.), Les Lectures du peuple en Europe et dans les Amériques (XVIIe -XXe siècle), Bruxelles, Éditions Complexe, 2003 ; Susanne Greilich et York-Gothart Mix (dir.), Populäre Kalender im vorindustriellen Europa: Der „Hinkende Bote“/„Messager boiteux“. Kulturwissenschaftliche Analysen und bibliographisches Repertorium, Berlin, New-York, De Gruyter, 2006.

28 Cf. Nicole Blondel, « L’Almanach royal, national, impérial : quelle vérité, quelle transparence ? (1699-1840) », dans Bibliothèque de l’École des Chartes, n° 166, 2008, pp. 15-87.

29 Cf. sur l’ensemble de ce genre en Allemagne : Volker Bauer, Repertorium territorialer Amtskalender und Amtshandbücher im Alten Reich. Adreß-, Hof-, Staatskalender und Staatshandbücher des 18. Jahrhunderts. Frankfurt, Klostermann, 1997-2005, 4 vol. ; et, sur les almanachs en langue française : Jan Ficker, « Kalender ,von Gottes Gnaden‘ : Der Churpfälzische Hof und Staatskalender/Almanach Palatin als repräsentatives Medium eines französisch geprägten Hofstaates », dans Hans-Jürgen Lüsebrink et York-Gothart Mix (dir.), Französische Almanachkultur im deutschen Sprachraum (1700-1815). Gattungsstrukturen, komparatistische Aspekte, Diskursformen, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2012 (à paraître).

30 Claudie Paye, « Almanach royal de Westphalie und Volkskalender im Vergleich. Ein Beitrag zur Kommunikationsund Zensurgeschichte im Königreich Westphalen (1807-1813) », dans Französische Almanachkultur, ouvr. cité. L’équivalent allemand de cet almanach en lange française parut en 1811 et en 1812 sous le titre de Hofund Staats-Handbuch des Königsreichs Westphalen.

31 Alexander Nebrig, « Orlando furioso im Monatskupfer. Chodowieckis literarische Topik für den Berliner Geneologischer Kalender », dans Französische Almanachkultur, ouvr. cité.

32 Document du 18 décembre 1812 cité par Paye, « Almanach royal de Westphalie », art. cité.

33 Voir Ruth Florack, « Göttinger französische Almanache der 1770er Jahre », dans Französische Almanachkultur, ouvr. cité.

34 Catriona Seth, « Les Muses de l’Almanach. La poésie au féminin dans l’Almanach des muses, 1789-1819 », dans Christine Planté (dir.), Masculin/Féminin dans la poésie et les poétiques du XIX e siècle, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 2002, pp. 109-119.

35 Lüsebrink, Haß, « L’Almanach des dames als Medium weiblicher Geschmacksbildung und Forum ,feministischer’ Gedanken », dans Französische Almanachkultur, ouvr. cité.

36 Voir sur ce point pour plus de détails, Hans-Jürgen Lüsebrink : « Médiation interculturelle et perception de l’Autre – l’Almanach du Théâtre d’August Wilhelm Iffland et les almanachs francophones en Allemagne au tournant du siècle », à paraître dans Euphorion, 2011 (sous presse), dont nous reprenons ici certains éléments.

37 Paul Ulrich, « Deutschsprachige lheateralmanache im 18. und 19. Jahrhundert », dans York-Gothart Mix (dir.), Almanachund Taschenbuchkultur des 18. und 19. Jahrhunderts, Wiesbaden, Steiner, 1996, pp. 129-142 ; Annegret Oesterlein, « Deutschsprachige lheateralmanache im 18. und 19. Jahrhundert » : « I) Entwicklung, Form, Inhalt », dans Aus dem Antiquariat, n° 1, 1979, pp. A1-A15 ; « II) Dokumentation », n° 26, 1979, pp. A86-A95 ; cf. aussi les études plus anciennes de Wilhelm Hill, Die Deutschen Theaterzeitschriften des achtzehnten Jahrhunderts, Weimar, Duncker, 1915, rééd. Hildesheim, Gerstenberg, 1979 ; Wolfgang F. Bender, Siegfried Bushuven et Michael Huesmann, Theaterperiodika des 18. Jahrhunderts. Bibliographie und inhaltliche Erschließung deutschsprachiger Theaterzeitschriften, Theaterkalender und Theatertaschenbücher, München, Saur, 1994.

38 Braun, Von der politischen zur kulturellen Hegemonie Frankreichs, ouvr. cité, pp. 154-161.

39 Almanach du Théâtre, 1809, p. 75.

40 Cf. sur ce sujet la thèse pionnière de Claudie Paye, « Der französischen Sprache mächtig… » Kommunikation im Spannungsfeld von Sprachen und Kulturen im Königreich Westfalen (1807-1813), Diss. Universität Saarbrücken, 2007, 2 vol. (publication en préparation) ; ainsi que le catalogue de l’exposition de Cassel, König Lustik ! Jérôme Bonaparte und der Modellstaat Königreich Westphalen, München, 2008.

41 Cf. Les Lectures du peuple, ouvr. cité ; Hans-Jürgen Lüsebrink, « Transferts culturels transatlantiques et circulation des savoirs dans les cultures populaires – le cas des almanachs de Benjamin Franklin », dans Tangence (Québec), numéro thématique « Transferts culturels entre l’Europe et l’Amérique du Nord aux XVIIIe et XIXe siècles. Circulation des savoirs, réappropriations formelles, réécritures, n° 72, 2003, pp. 27-40.

42 « Préface », dans Almanach du Théâtre pour l’an 1810, pp. I-IV, ici p. III.

43 Florack, « Göttinger französische Almanache », art. cité (à paraître).

44 « Der Kulturtransfer, den Dieterichs französischsprachiger Musenalmanach leisten soll, scheitert daran, dass ihm der, Sitz im Leben‘ fehlt » (ibid.)

45 « Coup d’œil sur l’origine, les progrès et l’état actuel du théâtre allemand », dans Almanach du Théâtre pour l’an 1810 par Aug. Guill. Iffland, directeur du Théâtre royal national de Berlin, traduit de l’allemand [Berlin, 1809], pp. 1-137.

46 Ibid., pp. 138-188.

47 « Tableau des théâtres de Paris et analyse des pièces nouvelles qu’on y a données depuis le 1er septembre 1807 jusqu’au 1er Septembre 1808 », dans Almanach du Théâtre pour l’an 1810, pp. 189-258.

48 « Préface », dans Almanach du Théâtre pour l’an 1810, pp. I-IV, ici p. III.

49 La version allemande parut sous le titre Kurkölnischer Hof Kalender.

50 Voir les exemples dans Fickert, « Kalender ,von Gottes Gnaden‘ », art. cité.

51 L’almanach publié à Weimar, chez Johann Heinrich, Verlag des Landes-Industrie-Comptoirs, [1808] porte le sous-titre : Nachweisung für die Jahre der christlichen Zeitrechnung von 1 bis 2200 = Calendrier universel des catholiques et des protestants : mit einer tabellarischen Nachweisung.

52 Lettre de Lichtenberg à Abraham Gotthelf Kästner, 22 décembre 1784. Cité d’après Florack, « Göttinger französische Almanache », art. cité.