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Marco Callegari, L’industria del libro a Venezia durante la restaurazione (1815-1848)

Florence : Leo S. Olschki Editore, 2016 (Biblioteca di bibliografia italiana). 286 p.

Amélie FERRIGNO

L’auteur propose cinq chapitres (précédés d’une Presentazione et d’une Introduzione), dans lesquels tous les aspects de « L’industria del libro a Venezia durante la restaurazione (1815-1848) » sont examinés, de la législation à l’organisation des ateliers typographiques, en passant par l’évolution de la figure de l’éditeur, jusqu’à la distribution commerciale et au rôle de la publicité. L’ouvrage s’achève par une table des appendices et un index des noms.

Dans le premier chapitre, il revient sur le contexte de la crise de l’imprimerie à Venise entre la fin de la République (1797) et le « Regno d’Italia napoleonico » (1805-1814). Depuis le xve siècle et jusqu’à la fin du xviiie, la cité occupait une place prédominante sur la scène éditoriale italienne. Mais la fin de la République et les évènements qui suivirent eurent de graves conséquences économiques. Milan, érigée en nouvelle capitale du Regno d’Italia, détrône brutalement la Sérénissime par son nouveau rayonnement politique, économique et culturel. La cité lagunaire résiste, redouble d’efforts et d’initiatives éditoriales originales qui marquent cette période et engagent de profonds changements dans l’édition. C’est ce qu’expose Marco Callegari dans ce chapitre court mais très clair, où le lecteur pourra apprécier les efforts didactiques fournis par l’auteur dans sa présentation des événements et du contexte historique et politique de ces quelques années à cheval entre la fin du xviiie siècle et le début du xixe siècle.

Le deuxième chapitre, plus conséquent, intitulé « Tipografie e librerie al tempo del Regno Lombardo-Veneto. La normativa e la sua applicazione », est consacré à la législation et aux nouvelles réglementations de l’activité des ateliers typographiques et des librairies, appliquées durant le royaume Lombardo-Vénitien. L’auteur présente d’abord les nouvelles lois puis, dans une seconde sous-partie, s’attarde sur des cas particuliers et analyse plusieurs exemples permettant de saisir les changements adoptés, ainsi que les fluctuations dans l’application de la loi, entre protectionnisme et libéralisme, selon les cas.

Le troisième chapitre est entièrement dédié aux hommes du livre. Marco Callegari revient en détail sur les activités des ateliers typographiques les plus importants, particulièrement ceux de Venise, et porte son attention sur les événements qui ont affecté les libraires, mais également les « banchettisti », longtemps ignorés et peu considérés jusqu’au renforcement de la surveillance policière durant la période des Habsbourg. Le chapitre s’appuie sur une série de documents inédits. Il est ponctué de divers tableaux qui facilitent la lecture et quantifient la production des imprimeurs et des libraires selon divers paramètres (lieux, années…).

Le quatrième chapitre se penche sur la production elle-même, à partir des données bibliographiques disponibles pour Venise et la Vénétie entre 1821 et 1847. Enfin, le dernier chapitre propose une analyse du commerce libraire. L’auteur souligne les diverses évolutions du xixe siècle (activité des vendeurs ambulants, spécialisation dans la fourniture de livres scolaires auprès de nombreuses librairies de province, rôle croissant de la publicité, développement des cabinets de lecture et des bibliothèques de prêt, nouveaux instruments de promotion de la lecture, importation de livres étrangers…).

En s’appuyant sur une importante documentation archivistique, souvent inédite, l’ouvrage de Marco Callegari offre une étude riche et détaillée, très utile à la compréhension de cette phase de l’histoire de l’édition vénitienne.

Caractérisée, depuis les débuts de l’imprimerie, par une domination et un succès sans interruption dans le paysage éditorial italien, voire européen, la cité vénitienne doit désormais faire face à une crise sans précédent, qui entraîne de profondes transformations. Ce travail comble un véritable angle mort de l’histoire du livre à Venise. En effet, considérée comme « marginale » et marquée par un déclin commercial et des difficultés économiques, l’activité éditoriale vénitienne durant ces années a été quelque peu délaissée des historiens et n’a pas suscité le même intérêt que d’autres centres typographiques et éditoriaux alors en plein essor, tels que Milan, Turin ou Florence. Ce sont précisément ces raisons et ce contexte particulier qui ont motivé l’étude de Marco Callegari. Comme le signale Mario Infelise dans la présentation qui ouvre l’ouvrage, l’auteur a le mérite d’offrir aux lecteurs une étude approfondie du renouvellement de l’édition vénitienne opéré à cette époque et des causes d’une transformation peu connue mais radicale. Fruit d’un remarquable effort didactique, de nombreux schémas, tableaux et graphiques permettent au lecteur de saisir avec plus d’aisance les enjeux de ces transformations.